Alors qu’Emmanuel Macron et Gabriel Attal s’étaient engagés à mieux protéger les filières agricoles fragilisées par les distorsions de marchés liées à l’afflux d’importations ukrainiennes en Europe, la France vient de voter en faveur d’une reconduction de la libéralisation des échanges avec Kiev. Pour les agriculteurs et les filières concernées, c’est la volte-face de trop.
« L’exécutif a-t-il seulement pris la mesure des attentes et enjeux partagés par le monde agricole lors de nos mobilisations de ces dernières semaines ? » C’est la question que peuvent légitimement se poser les filières avicoles, betteravières et céréalières françaises. Les producteurs français soutiennent pleinement les Ukrainiens dans leur combat pour la liberté, mais les agriculteurs ne peuvent plus supporter seuls les conséquences économiques de ce soutien.
Avec des coûts de production près de deux fois moins élevés, des modèles agricoles et des normes environnementales sans commune mesure avec les nôtres, les productions ukrainiennes déstabilisent profondément nos marchés depuis de nombreux mois. Et, dans un contexte économique dégradé pour les agriculteurs, les effets de la libéralisation des échanges agricoles et alimentaires avec l’Ukraine, en cours depuis deux ans en Europe, atteignent aujourd’hui une ampleur insoutenable.
Une situation critique à laquelle le président de la République et son Premier ministre s’étaient engagés à remédier en sollicitant l’activation de clauses de sauvegarde au niveau européen.
C’est pourtant tout le contraire qui s’est déroulé hier mercredi : lors de la réunion des ambassadeurs, la France a voté en faveur d’une proposition de la Commission européenne qui prolonge la libéralisation du commerce avec l’Ukraine, avec des mesures de protection inefficaces au vu des volumes concédés, des considérations techniques proposées, et des délais appliqués. Le matin même, le Premier ministre assurait pourtant avoir obtenu des avancées pour mieux protéger les agriculteurs face aux importations ukrainiennes en matière de volaille, d’œuf et de sucre. Tout en assurant qu’il s agissait d avancées attendues, il précisait que la France était également mobilisée pour inclure les céréales dans les mécanismes de protection.
Les producteurs alertent depuis des mois, ils ne peuvent plus se contenter de demi-mesures et ont besoin immédiatement :
• D’une clause de sauvegarde automatique incluant les céréales ;
• De mécanismes de sauvegarde efficaces notamment pour les produits ne bénéficiant pas de droits de douanes ;
• D’une référence à des volumes importés supportables par les filières.
Pour les agriculteurs et leurs filières, ce profond décalage entre la parole et les actes n’est plus acceptable : « Notre amertume est proportionnelle aux espoirs suscités : cela fait des semaines que l’on nous balade avec des mots ! S’il s’agit une opération de communication destinée à garantir la perspective d’une visite calme et tranquille au président de la République lors du Salon de l’agriculture, nous proposons une méthode plus simple pour le même résultat : écouter et agir ! Et, à minima, tenir sa parole ! ».