Bien gérer la destruction du couvert
Type de sol, espèces du couvert, bénéfices agronomiques, conditions météo, matériel disponible… la date de destruction d’un couvert est un judicieux compromis. Favoriser la nutrition azotée et la structure du sol, sans compromettre sa disponibilité en eau, il s’agit avant tout de préserver le potentiel de la culture du maïs.
Le chiffre du mois
30, c’est le nombre d’unités d’azote par ha, qu’un couvert enfoui de légumineuses pures pourra restituer en moyenne au maïs. Association générale des producteurs de maïs.
DATE DE DESTRUCTION DU COUVERT : UN COMPROMIS INÉVITABLE
Les dates de destruction du couvert peuvent être extrêmement variées avant maïs. Selon la région, la Directive Nitrates autorise des destructions de début novembre à début février. Elles peuvent être retardées chez certains agriculteurs jusqu’à début avril, en raison des conditions climatiques, ou agronomiques.
UNE DATE DE DESTRUCTION LE PLUS TÔT POSSIBLE
Attendre un ressuyage suffisant pour intervenir
Que ce soit par le gel, le roulage, un travail superficiel voire un broyage, un couvert bien développé est plus facile à détruire. Certaines espèces sont touchées par le gel de façon quasi systématique comme la féverole, le niger et le tournesol. Mais beaucoup d’espèces sont encore en place en sortie d’hiver si les températures ne sont pas descendues en-deçà de -5 à -10°C. C’est le cas de la moutarde ou du radis, de la phacélie, des graminées en général. L’hiver 2019-2020 ayant été particulièrement doux, une destruction mécanique par broyage ou travail superficiel est le plus souvent nécessaire, et ce quelle que soit la nature du couvert. Si la date est essentielle et qu’il est en général important d’intervenir avant le 15 mars, les conditions de ressuyage du sol sont déterminantes, car toute intervention en conditions limite sera préjudiciable à l’enracinement du maïs, surtout si la préparation du sol se fait sans labour. En cas de labour, l’intervention doit être réalisée peu de temps avant le semis du maïs. Au préalable, il est nécessaire de détruire la culture intermédiaire, idéalement en février, avec un passage d’outil (broyeur, déchaumeur…).
Vigilance avec les couverts exploités en cultures dérobées
Les éleveurs choisissent parfois d’exploiter leurs couverts végétaux en fourrage, le plus souvent un ray-grass d’Italie, associé ou non à une légumineuse, pour constituer un stock fourrager supplémentaire. L’herbe ensilée ou enrubannée viendra compléter la ration des bovins en fin d’été ou au cours de l’hiver. Il est recommandé de récolter ce type de couvert assez tôt, la valeur
alimentaire de l’herbe diminuant nettement au delà du stade début épiaison. Une récolte précoce est aussi conseillée pour limiter l’assèchement du profil, préjudiciable au maïs qui suit. Par ailleurs, ces couverts exploités en fourrage exportent des quantités non négligeables d’éléments minéraux. Si la fertilisation du maïs n’en tient pas compte, des carences en azote, voire en potassium pourront apparaître. Le chantier de récolte s’appuyant sur des engins lourds, de bonnes conditions de récolte seront primordiales pour préserver la structure du sol et la capacité d’enracinement du maïs. En pratique, il faut se tenir prêt et saisir le premier créneau disponible, souvent à partir de mi-mars.
DESTRUCTIONS PLUS TARDIVES DU COUVERT AVANT MAÏS PARFOIS POSSIBLES
Des bénéfices parfois inattendus grâce aux légumineuses
Les dates de destruction du couvert avant maïs peuvent être retardées jusqu’à début avril, soit à cause des conditions climatiques comme cela pourrait être le cas en 2020, soit volontairement afin de maximiser certains de leurs bénéfices agronomiques. Les destructions tardives apportent en effet dans certaines situations des bénéfices inattendus. L’essentiel est de ne pas compromettre la levée et le rendement de la culture. Allonger la période de couverture du sol apporte une meilleure préservation des sols sensibles à la battance, à l’érosion, ou à la reprise en masse, ainsi qu’une compétition plus longue sur les adventices. Plus la destruction du couvert est tardive, et donc plus le délai est court entre la destruction et le semis du maïs, plus l’impact du couvert peut être négatif sur le rendement du maïs, avec des effets dépressifs en particulier avec les graminées détruites tardivement. En revanche, des gains de rendement ont parfois été observés avec des légumineuses seules ou associées détruites tardivement, en particulier lorsque le maïs n’est pas fertilisé.
Des essais menés avec différentes espèces de couverts et trois dates de destruction
ARVALIS – Institut du végétal a mené trois essais en 2012-2013 (limon argileux à Gaillac-81 ; limon sablo-argileux à Artigueloutan-64 ; limon argileux à Boigneville-91) et un en 2013-2014
(limon argileux à Gaillac-81). Différentes espèces de couverts ont été semées (seigle, navette, phacélie, féverole d’hiver, trèfle incarnat). Elles ont été implantées de fin août à début septembre et détruites à trois dates en novembre, février et avril. La fertilisation azotée est restée identique quels que soient le couvert et sa date de destruction. Les essais ont été volontairement sous-fertilisés.
DE L’AZOTE DISPONIBLE SEULEMENT APRÈS LÉGUMINEUSES
Une nette différence de capacité à minéraliser a été observée selon le type d’espèce de couvert utilisé (figure 1). Les fournitures d’azote potentielles sont limitées pour les phacélie, seigle et navette. Elles peuvent même être négatives temporairement (phase d’organisation pour des résidus à rapport C/N élevé) à une période qui coïncide avec les besoins précoces en azote du maïs dans le cas des destructions de février et avril. Les légumineuses offrent des cinétiques de minéralisation de leurs résidus beaucoup plus favorables, que leur destruction soit précoce ou tardive. Les légumineuses détruites en avril présentent une minéralisation très rapide qui peut profiter au maïs implanté peu de temps après.
UN IMPACT POTENTIEL VIS-À-VIS DE LA DISPONIBILITÉ HYDRIQUE
Autre paramètre étudié, le remplissage de la réserve en eau sur le site de Gaillac : aucun écart n’a été observé entre les espèces du couvert ou entre les destructions de novembre et février. En revanche, il manquait environ 15 mm d’eau dans le sol sur l’horizon 0-120 cm pour la destruction d’avril (pour une augmentation de biomasse des couverts de 1,0 à 1,5 t MS/ha). Cette valeur peut sembler faible, mais elle n’est pas négligeable en cas de situation hydrique très limitante.
Semis sous couvert vivant : difficile pour le maïs !
Six essais ont été conduits par ARVALIS entre 2013 et 2017 pour mesurer l’impact d’un semis direct de maïs dans un couvert de légumineuse déjà installé et maintenu vivant dans la culture. Il en ressort que le maïs n’est pas la culture qui se prête le mieux à ce type de conduite. En effet, les légumineuses démarrent leur cycle végétatif plus tôt que le maïs au printemps et exercent donc une
compétition précoce, dommageable pour le maïs. La levée du maïs est également plus délicate en semis direct dans le couvert ou si un travail du sol a créé des mottes dans le lit de semences.