Préserver le potentiel. Le maïs est particulièrement sensible à la concurrence des adventices. Le désherbage est donc une étape clé, avec un enjeu fort. Son objectif principal est avant tout de préserver
le potentiel de rendement de la culture qui non désherbée correctement, peut subir une perte de rendement très significative, pouvant aller jusqu’à 100% pour les situations les plus extrêmes. Le second objectif est de préserver la propreté de la parcelle pour les prochaines années. Une seule année de relâchement entraînera la reconstitution du stock grainier, et donc la complication du désherbage pour les années suivantes.
Le chiffre du mois : 1 gramme de graines/kg : c’est la limite maximale fixée pour les graines de datura dans toutes les matières premières ou aliments pour animaux (Directive Européenne 2002/32). L’objectif est donc de n’avoir aucune plante dans la parcelle.
RAISONNER SA STRATÉGIE DE DÉSHERBAGE
L’objectif du désherbage est de limiter la nuisibilité des adventices. Il s’agit de préserver le
potentiel de la culture (rendement et qualité) et de limiter le re-salissement de la parcelle par
l’enrichissement du stock grainier et préserver les cultures suivantes et les parcelles voisines.
DÉFINIR SA STRATÉGIE
Il existe de multiples façons de désherber un maïs : avant ou après la levée, avec des produits phytosanitaires ou mécaniquement, en application sur la totalité de la surface ou en combinant des pratiques différentes entre le rang ou l’inter-rang. Le choix de la stratégie de désherbage doit se
faire dans une approche globale du système de production et intégrer différents critères :
• Critères agronomiques : contexte pédoclimatique, nature et densité de la flore adventice, choix de l’itinéraire technique (en matière de rotation, travail du sol et date de semis), etc.
• Critères réglementaires : contraintes sur certains produits, mesures locales, etc.
• Critères techniques : disponibilité en main d’oeuvre, organisation du temps de travail, disponibilité de l’équipement, etc.
• Critères économiques et environnementaux.
Les critères agronomiques restent déterminants car ils sont la garantie d’une efficacité et d’une sélectivité indispensables à la maîtrise des populations d’adventices et à la préservation du bon état végétatif et sanitaire de la culture. La durabilité du désherbage, notamment la gestion des graminées en prélevée, doit passer par un raisonnement fin du choix des produits et de leurs doses d’emploi. Depuis plusieurs années, Arvalis évalue l’efficacité de différentes solutions alternatives visant à réduire le recours aux herbicides de la famille des chloroacétamides. Néanmoins, dans les situations à forte pression en graminées estivales, notamment sur des parcelles à teneur en matière organique élevée, il peut s’avérer nécessaire de mettre en oeuvre des doses supérieures d’anti graminées racinaire, sans dépasser les doses actuellement homologuées, en alternant les substances actives (s-métolachlore, dmta-P, pethoxamid) ou en les associant. Il est également possible d’envisager un positionnement de ces herbicides en post-levée précoce, ce qui optimise la gestion de la dose en assurant une meilleure concordance entre la période de sensibilité de la culture et la période de levée des adventices.
BIEN POSITIONNER LES INTERVENTIONS
Exploiter la gamme des solutions phytosanitaires
Bien que la gamme des herbicides maïs se rétrécisse, chaque situation peut encore trouver sa solution, sous réserve d’effectuer le diagnostic des besoins réels. Les résultats des essais menés par ARVALISInstitut du végétal montrent qu’en présence d’une flore à dominante de graminées, l’application d’herbicide racinaire en pré-levée des adventices (famille des chloro-acétamides) permet d’obtenir un désherbage satisfaisant dans plus de 90 % des situations. Inversement, ces mêmes essais indiquent qu’en présence d’un cortège diversifié de dicotylédones classiques ou plus difficiles (renouées, mercuriales…), une double intervention en post-levée permet d’obtenir les meilleures performances. Dans ce cas, le choix des produits est un élément stratégique car il doit permettre d’ajuster la complémentarité des spectres à la diversité de la flore à contrôler. Le positionnement du premier passage doit se faire sur des adventices jeunes (graminées de 1 à 3 feuilles, dicotylédones de 2 à 6 feuilles en fonction de l’espèce). Un unique passage en post-levée précoce, vers 2-3 feuilles du maïs, est une technique très pointue qui associe un antigraminée racinaire à un produit foliaire. Elle ne peut être valorisée qu’avec une bonne humidité du sol au moment du traitement ou une pluviométrie suffisante après application, sachant qu’à ce stade du maïs on ne profite plus de la fraîcheur du lit de semences. C’est une stratégie d’opportunité annuelle. En présence d’une flore complexe de graminées et de dicotylédones, la stratégie la plus performante consiste à réaliser une intervention en pré-levée avec un antigraminée, puis une application en post-levée adaptée à la flore présente. En présence d’une flore annuelle complexe, les herbicides racinaires à large spectre assurent un contrôle important des graminées et des dicotylédones, surtout s’ils sont complétés par un herbicide apportant de l’isoxaflutole ou de la pendiméthaline. L’intervention en pré-levée agit comme un traitement de fond sur les graminées, mais aussi sur les dicotylédones difficiles en retardant et en regroupant leurs levées ce qui facilite l’intervention suivante effectuée.
Envisager le désherbage mécanique
Le maïs est une plante semée avec un interligne large qui permet des interventions mécaniques. Le désherbage mécanique peut être mis en place très précocement avec une houe rotative ou une herse étrille jusqu’à la fermeture du couvert végétale avec une bineuse (au environ du stade 12-14 feuilles –
stade limite de passage du tracteur). Pour maximiser l’effet du binage, plusieurs facteurs de succès entrent en compte : stade de développement, météo et profondeur de l’intervention. Il est préférable d’intervenir sur les adventices jeunes de 2 à 4 feuilles maximum. La réussite de l’intervention est très liée aux conditions météo dans les jours qui suivront l’intervention. Privilégier un temps séchant le
jour de l’intervention et l’absence de pluies dans les 3 jours suivants. La profondeur de travail devra également être adaptée aux espèces à détruire. Un binage trop profond peut effectivement favoriser de
nouvelles levées ou permettre le redémarrage d’adventices déchaussés avec la motte. L’efficacité du désherbage mécanique reste limitée sur les infestations de vivaces. En effet, chaque intervention mécanique revient à sectionner les rhizomes de la plante vivace et chaque portion de rhizome va donner naissance à une nouvelle plante.
Combiner les pratiques
Les stratégies mixtes faisant intervenir le traitement chimique localisé sur le rang, demandent de bien adapter le réglage de l’outil pour assurer le recouvrement de la pulvérisation localisée sur le rang sur 20 à 30 cm de large et de l’action du binage sur l’inter-rang. Le perfectionnement des équipements de la bineuse (moyen de guidage, buttage des pieds de maïs sur le rang, bineuse à doigts de type Kress) permettent de limiter cet effet. Ces stratégies mixtes apparaissent plus compliquées à mettre en oeuvre, car elles combinent les contraintes des stratégies chimiques et des stratégies mécaniques. De
plus, l’efficacité aléatoire de l’intervention mécanique peut augmenter le nombre de passages complexifiant sa mise en oeuvre. La sensibilité aux conditions pédoclimatiques est globalement plus importante pour les interventions mécaniques en raison des exigences spécifiques de travail du sol et de ressuyage. L’intégration du mécanique et/ou la localisation d’herbicide sur le rang de culture, en complément ou remplacement d’un herbicide en plein, apporte un niveau d’efficacité acceptable si la flore présente sur le rang n’est pas trop dense (attention notamment aux graminées). L’efficacité d’une stratégie est un critère essentiel de son choix, mais d’autres tels que les conditions de mise en oeuvre (la faisabilité technique) ou les critères économiques sont tout aussi importants.
Afin d’intégrer des éléments décisifs dans le choix, différents indicateurs économiques ont été calculés (tableau) :
• Coût moyen de la stratégie intégrant les postes phytosanitaires, matériel et main d’oeuvre ;
• Temps de mise en oeuvre ;
• Consommation en carburant du matériel ;
• l’IFT (indice de fréquence de traitement), qui quantifie l’utilisation des produits phytosanitaires.
L’indicateur « coût moyen » montre une forte disparité et ne peut être jugé indépendamment
d’autres critères tels que la performance technique et la souplesse de mise en oeuvre. Le traitement localisé sur le rang présente un coût globalement acceptable par rapport à un traitement en plein (environ 20 € à 40 €/ha). Bien qu’il y ait un gain financier sur l’utilisation de produits (70 % de produit épandu en moins), celui-ci est gommé par le coût du matériel à l’hectare, qui revient jusqu’à 50 %
plus cher qu’un pulvérisateur classique en raison, notamment, d’un débit de chantier plus faible. L’IFT diminue logiquement avec les stratégies mixtes et celles incorporant un traitement localisé sur le rang, jusqu’à s’annuler avec le tout mécanique. Là encore, ce critère seul ne suffit pas et doit être mis en regard de performances technico-économiques.